Nous sommes encore trop nombreux à dormir en insuffisance et non sans conséquence. Le manque de sommeil, fléau de notre époque, reste une source encore souvent insoupçonnée de maux du quotidien.
Nous passons près d’un tiers de notre vie à dormir et pourtant, nous atteignons rarement notre quota d’heures de sommeil dans le cadre de nos vies modernes agitées et toujours plus connectées. D’après une étude de l’Insep sur les Français et leur sommeil réalisée en 2017, manquer de repos serait bien plus monnaie courante que nous ne le soupçonnons : « Sur la base des déclarations de la population des 25-45 ans interrogée, 17 % accumuleraient chaque nuit une dette importante de sommeil, 12 % seraient insomniaques, et 71 % auraient un sommeil suffisant. 45 % des personnes interrogées estiment dormir moins que ce dont elles ont besoin. » Des chiffres toujours d’actualité en 2017 et confirmés par une étude plus récente de l’Inserm. La fatigue est donc bel et bien un mal du siècle.
Un vecteur de faiblesse immunitaire et de surpoids
Si les troubles du sommeil génèrent tant de préoccupations auprès des professionnels de santé, c’est parce qu’ils peuvent être lourds de conséquences à terme, tout en handicapant déjà notre quotidien de manière insoupçonnée. “Lorsqu’on est en dette de sommeil, fatigué et somnolent, on aura beaucoup du mal à comprendre et interpréter son environnement ou encore stocker des informations” explique Claudie Gronfier, chronobiologiste. On a découvert que le sommeil est nécessaire au bon fonctionnement du cerveau. Il est aussi est impliqué dans un nombre de fonctions extra-cérébrales et qu’il est fondamental dans la régulation du métabolisme, incluant le système immunitaire et le système cardio-vasculaire. Rhumes et infections à répétition, glycémie qui s’emballe, augmentation de l’appétit… Ce sont là les premiers facteurs parmi d’autres d’un besoin évident de repenser ses temps de repos.
Un perturbateur de nos émotions et de notre productivité
S’assurer des nuits suffisamment longues et dans de bonnes conditions est dès lors indispensable pour préserver son capital santé mais aussi rester maître de ses émotions. En effet, la fatigue n’influe pas uniquement sur notre résistance interne, elle met également notre gestion des émotions en péril. D’après l’étude de 2007 de l’Université de Berkeley et de Harvard, les centres émotifs du cerveau deviennent 60% plus réactifs à la suite d’un manque de sommeil. “Lorsqu’il manque de sommeil, le cerveau semble revenir à des circuits plus primitifs, en ce sens qu’il semble soudainement incapable de mettre certaines émotions en contexte afin de produire une réponse contrôlée et appropriée”, spécifie dedans Matthew Walker, directeur du UC Berkeley’s Sleep.
Des chiffres qui doivent particulièrement attirer l’attention des parents sur l’importance d’un coucher ponctuel pour les jeunes enfants et les adolescents. Selon les indications du Réseau Morphée, ceux-ci ne dorment en moyenne que 7 heures 45 au lieu des 9 à 10 heures dont ils ont réellement besoin, devant ensuite jongler entre école et vie sociale. Apprendre les bons réflexes est donc crucial dès le plus jeune âge pour conditionner des nuits efficaces. L’étude de l’Inserm met de ce fait également en lumière que « 13 % de la population considère que le sommeil est une perte de temps. » Adopter un bon rythme de vie pourrait bien démarrer par une reconsidération de l’importance de dormir. Si notre époque définie par les écrans et l’hyperactivité nous détourne de nos besoins primaires, il est plus que temps de redonner au sommeil son importance et de le considérer, au même titre qu’une vie active et une alimentation équilibrée, comme un facteur primordial de notre hygiène de vie et de notre sérénité.
Par Sophie Vande Kherkove
Nos sources :
« A quoi sert le sommeil ? », Réseau Morphée, 2016, reseau-morphee.fr
« Sleep loss linked to psychiatric disorders », 2007, Etude de Yasmin Anwar, Université de Berkeley
« Les français et leur sommeil », INPES, Dossier de presse 2008, inpes.santepubliquefrance.fr
« Le sommeil de A à Z », Institut National du Sommeil et de la Vigilance, institut-sommeil-vigilance.org
« Sommeil : faire la lumière sur notre activité nocture », 2017, inserm.fr
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